Le paysage du Val de Loire

Le Val de Loire, inclus au patrimoine de l’UNESCO depuis 2000, est connu pour son bâti et son patrimoine naturel exceptionnels articulés autour de la pierre, la vigne, l’eau et les jardins. Comme tous les territoires, le Val de Loire est susceptible de subir la réalisation de risques et menaces sur le grand paysage (de 1 à 10 km), le moyen paysage (100m à 1 km) et à l’échelle de proximité (0m à 100m). Celles-ci peuvent être diverses et venir des inondations qui endommagent les berges et les alentours, de l’implantation d’éoliennes, d’incendies ou tout simplement des paysages délaissés et non mis en valeur pour un meilleur accès des habitants. Il est ainsi nécessaire de mettre en place des mesures de protection normatives visant à maintenir la qualité de tous les paysages du Val, qu’ils soient bâtis ou naturels : inscription et classement de site, site patrimonial remarquable etc… Dans une optique de renforcement de cette protection, un plan de gestion du Val a été mis en place en 2012. Il regroupe 9 orientations, dont 6 relatives au paysage.

Bord de Loire, Combleux, Photo Adélie Jamet
Bateaux traditionnels de la marine de Loire, Combleux, photo Adélie Jamet

Orientation n°1 : L’encouragement à la conclusion de contrats régionaux de solidarité territoriale pour une harmonie et une cohésion territoriale au sein des régions ligériennes

Diagnostic

Chaque commune a sa propre politique d’aménagement et de gestion de son territoire. Même regroupées au sein d’un EPCI, elles ne possèdent pas toutes le même budget ni les mêmes capacités physiques et matérielles. Cela donne alors des gestions très différentes d’un territoire à l’autre, rendant difficile voire empêchant une harmonie et une cohésion à l’échelle de la région.

Proposition d’action

La première proposition est d’ordre méthodologique : l’ouverture des politiques locales à une politique commune. C’est pour cela que les contrats régionaux de solidarité territoriale ont été créés en 2012. En effet, leur but est d’aider les communes dans le besoin pour des aménagements équilibrés de leurs territoires et pour assurer cohésion à la fois sociale et territoriale entre les zones urbaines et rurales mais aussi entre les territoires nord et sud de l’axe ligérien. A cet effet, les communes bénéficient d’un financement solidaire de la région et d’un dialogue amplifié avec (pour une durée de 6 ans). A titre d’exemple, la région Centre-Val de Loire met en œuvre ces contrats depuis 9 ans.

Les domaines d’intervention de ces contrats sont nombreux et actuels, notamment avec le développement durable en matière de mieux-être social, d’économie d’énergie et de transition énergétique, d’emploi ou encore de préservation de la biodiversité. 

La Région Centre-Val de Loire mettant en œuvre ces contrats, ce n’est pas le cas des autres régions par lesquelles la Loire passe (et ce même si l’on s’intéresse aux portions de Loire en dehors de celle classée au patrimoine de l’UNESCO). C’est le cas des régions Pays de la Loire, Bourgogne, Rhône-Alpes ainsi que l’Auvergne. Celles-ci n’ont pas conclu de tels contrats avec leurs départements. Il paraît ainsi légitime d’encourager à la fois les régions (au moins la région Pays de la Loire car un segment classé au patrimoine de la Loire s’y trouve), mais également les intercommunalités du Val à conclure des CRST et à les articuler avec leurs politiques. Cela pourrait à la fois favoriser la cohésion sociale mais aussi territoriale au sein d’un espace plus vaste que celui d’une seule commune. Dans cet objectif, des aides financières de la Région et un dialogue facilité avec elle sont mis en place. De plus, ce contrat décline les enjeux, les axes de travail et les investissements éligibles sur une période donnée pour accompagner dans la durée les aménagements de territoires au départ séparés et non harmonieux.

Par exemple, le CRST Loire Beauce a été approuvé le 12 mai 2017 et sur une enveloppe totale de 8125000 €, 6495000 € (dont 500000 € pour A Vos ID) ont été alloués pour une enveloppe Pôle d’animation, 596000 € pour Logement social de et 544000 € pour les espaces publics.

Toutefois, il est important de notifier la difficulté que cette proposition pose : celle de l’harmonisation des nombreux territoires sur lesquels la Loire passe. Du fait de leur nombre, ils sont très vastes et peuvent handicaper la mise en place de tels contrats.

L’initiative débute alors par le président du conseil régional qui ouvrira le dialogue auprès des élus des EPCI qui eux-mêmes dialogueront avec les élus communaux.

A l’échelle du plan de gestion du Val de Loire, cela signifierait rajouter une orientation méthodologique prévoyant et encourageant ce contrat en plus des politiques locales déjà existantes.

➜ Régions, EPCI, communes.

Séparation de l’écluse de la Loire et du canal d’Orléans, berges herbeuse, Combleux, photo Adélie Jamet

Orientation n°2 : La valorisation et la protection des paysages des bords de Loire

Diagnostic

Les bords de Loire sont un élément pivot pour sa mise en valeur. La Loire étant considérée comme un “fleuve sauvage” elle a quand même été modifiée pour être adaptée à l’Homme et à ses activités. Le fleuve en lui-même est laissé libre, seuls les abords sont modifiés par un système de digues établi depuis le 8ème siècle sur plus de 710 km et régulièrement renforcé. Le fleuve lui-même et les digues doivent être protégés tels quels puisqu’ils caractérisent le paysage des bords ligériens.

La renommée du Val est conséquente, mais parfois, la mise en valeur et la protection conjuguées des paysages proches du fleuve peuvent être questionnées. Un paysage délaissé, non rénové, ni même modernisé ou sans diversité de paysages sur ses berges est un paysage qui peut perdre de son attrait et qui est susceptible d’être plus affecté par les différentes menaces. Afin de parvenir à une mise en valeur et une protection du Val, plusieurs solutions sont possibles.

Proposition d’action 2.1

Dans le but d’accroître la qualité des paysages du bord de Loire, les communes peuvent encourager la diversité des espaces verts et des cultures dans la zone inscrite et la zone de protection. De plus, et comme l’imperméabilisation des sols constitue un problème dans l’enjeu climatique, cela permettrait de revoir les pratiques agricoles et d’empêcher le fait que ces terres deviennent imperméables par leur surexploitation. Ainsi l’encouragement à la diversité des cultures, des plantations ou encore du maraîchage peut favoriser la mise en valeur du paysage tout en le protégeant (dans sa biodiversité comme contre les menaces d’imperméabilisation des sols).

Par ailleurs, la réorientation de la politique agricole territoriale peut être menée au travers de PAT (ou Projets Alimentaire Territoriaux) issus de la loi d’avenir pour l’agriculture de 2014. Ces plans doivent donner un cadre stratégique et opérationnel à la politique agricole locale grâce à une élaboration concertée à l’échelle de la région. L’ajout dans les PAT du Val de Loire d’axes orientant l’action des acteurs publics ou privés de la filière agricole sur une agriculture durable et locale serait donc bienvenu.

Jardin partagé en permaculture, mairie de Combleux, photo Adélie Jamet

Ces actions peuvent être guidées par les communes et pour un accompagnement financier et administratif, un “contrat nature” est possible avec soit la commune seule soit l’ensemble des communes regroupées en EPCI (même si une politique sectorielle spécifique est toujours possible). 

De plus, dans le cas de l’encouragement à la diversification des espaces, un dialogue pourrait s’ouvrir notamment par le biais de la commission départementale de la nature des paysages et des sites. Les projets rentrant dans le cadre de la « Transition agricole, alimentation et forêt » peuvent aussi prétendre à une aide des Chambres de l’agriculture dans le cadre du Plan de Relance annoncé en 2020 (visant à renforcer la souveraineté alimentaire, accélérer la transition agroécologique, et adapter l’agriculture et la forêt aux changements climatiques).

➜ Communes, EPCI, Chambres d’agriculture…

Proposition d’action 2.2

La sous proposition 2 se concentre quant à elle sur la protection du paysage face aux inondations qui constituent une menace majeure.

Souvent causée par la forte augmentation des précipitations et la saturation des sols, il est légitime de proposer la création de bassins de rétention aux abords du Val de Loire. Pour cela, tout d’abord, il est important de favoriser les zones humides et limiter ainsi les risques et les conséquences des crues (ces bassins fonctionnent comme des éponges en absorbant les trop-pleins et en limitant les ruissellements à l’origine des inondations).

Ceux-ci peuvent être à l’initiative des acteurs locaux tels que les EPCI (l’agglomération d’Orléans Val de Loire par exemple qui a créé un bassin de rétention paysager : voir la photo ci-dessous). Ils pourront permettre de limiter les endommagements du paysage liés à ces catastrophes. De plus, ils peuvent s’inscrire dans le cadre d’une mise en valeur du paysage si le bassin est fortement végétalisé. Toutefois, il est nécessaire de préciser que cela peut représenter un fort coût.

Sur la carte suivante nous pouvons observer que le Val de Loire possède de nombreuses zones dites humides, bien que leur nombre ne soit pas répertorié. Il serait intéressant de placer des bassins de rétention sur ces zones et ainsi à la fois protéger le paysage mais également le mettre en valeur en végétalisant les bassins.

➜ Particuliers, EPCI.

Méandres de la Bionne (sous-affluent de la Loire) recréé à Saint Jean de Braye, photo Adélie Jamet
Méandres et berges de la Bionne restaurés, Saint Jean de Braye, photo Adélie Jamet

Orientation n°3 : Faire du Val de Loire un paysage plus attractif intégrant des équipements de lutte contre le changement climatique

Diagnostic

Selon l’ADEME et la DREAL, le changement climatique a des effets non négligeables sur les régions pays de la Loire et Centre-Val de Loire. Ainsi, les étés, les printemps et les automnes sont de plus en plus chauds et les hivers moins rigoureux. De plus, il y a une évolution du cumul annuel des précipitations. Les secteurs forestiers, agricoles et les milieux aquatiques sont en conséquence également touchés. Par exemple, il y a des taux inquiétants de dépérissement des forêts à dominance de chênes et une avancée de la floraison de tous types de végétaux. Il est également légitime de parler des grandes crues/inondations et sécheresses occasionnées qui peuvent menacer le paysage ligérien (surtout les inondations).

Face à ce changement climatique, il apparaît nécessaire pour le plan de gestion de prévoir des aménagements favorisant cette lutte. Ainsi, et même s’il prend en compte le besoin d’augmentation de lieux publics, ceux-ci doivent à la fois répondre à des impératifs d’attractivité mais également de prise en compte des mobilités douces et non polluantes. Nous pouvons prendre pour exemple Orléans qui les privilégie sur le bord de Loire : des parcours sportifs, de nombreux bancs et chaises avancés et élevés par rapport à la Loire ainsi que de larges pistes cyclables sont prévus. On remarque toutefois la persistance de lacunes comme avec la commune de Blois, celle-ci ne possédant qu’une seule aire d’accueil publique, le reste de la berge étant fermée à ces possibilités. De plus, les places réservées aux véhicules électriques se font rares.

Pour finir, certaines berges sont peu rénovées et ne disposent pas d’assez d’aménagements prévus pour rendre le paysage attractif ni faciliter son accès.

Proposition d’action 3.1

Tout d’abord, la modernisation des quais par une rénovation des équipements déjà présents ou leur création : installations d’aires de pique-nique, bancs, de diversification des plantations issues d’essences naturelles ligériennes sur les berges nues pour susciter des points d’ombre et mettre en valeur le paysage, ou encore la création de parcours sportifs est aussi envisageable, par exemple à l’Ile Simon à Tours, de nombreuses tables et bancs sont présents, ainsi qu’un skate parc. De plus, il serait opportun de créer des points d’accès et de traversées faciles de la Loire pour les piétons et vélos plus que pour les véhicules, comme par exemple le pont de fil qui traverse l’île Aucard à Tours et qui est exclusivement réservé aux piétons ou cyclistes. Une possibilité est de réduire l’espace dédié aux voitures afin de rééquilibrer la répartition de l’espace pour les mobilités douces.

En cas d’impossibilité, la construction de points de passages spécifiques, de petits ponts ou ponts légers à fils peu coûteux, peut aussi être envisagée (entre les centres et les villes plus isolées par exemple, comme Tours et Langeais). Ces deux solutions (nouvelle répartition de l’espace et constructions nouvelles) peuvent s’allier afin de permettre une circulation fluide, des points de passages réguliers et une limitation du nombre de construction dont la multiplication pourrait atteindre le patrimoine du Val.

Par ailleurs, il faut aussi ouvrir les lieux proches de la Loire mais non visibles comme les zones humides pour favoriser une attractivité à l’échelle de l’ensemble du paysage ligérien et non du seul bord de Loire, voire créer des cheminements favorisant la randonnée dans le Val.

L’idée dans cette proposition est de combler les orientations du plan de gestion du Val de Loire en y intégrant la nécessité de rénovation de certaines berges, d’aménagement de certains nouveaux équipements ainsi que d’encouragement des EPCI et communes à intégrer d’office ces dispositions dans leur PLU/PLUI.

➜ EPCI, communes, État.

Chemin de promenade piéton et vélo récemment agrandi, Combleux, photo Adélie Jamet

Proposition d’action 3.2

La lutte contre le changement climatique passe par une meilleure prise en compte des mobilités douces comme les vélos, les véhicules électriques, les trottinettes…etc.

En ce qui concerne les véhicules propres, même si en 2021 l’utilisation nationale des véhicules hybrides et entièrement électriques n’est que minoritaire (respectivement 22,6% et 5,8%), leur utilisation s’est accrue en région Centre-Val de Loire d’après la DREAL. Alors, il serait opportun d’intégrer des équipements tels que des parkings avec des bornes de rechargement pour véhicules électriques ou de prévoir de telles places sur les parkings déjà existants tout en l’intégrant de manière harmonieuse dans le paysage.

Pour les autres modes de transports doux tels que le vélo ou la trottinette, un développement des pistes cyclables sur des segments où elles manquent ou là où l’attractivité et l’accès au Val devraient être renouvelés (en plus de celles prévues pour la Loire en vélo) ainsi que des aménagements de mobilités partagées (vélib’ ou indigo Wheel par exemple) pourraient être des solutions. Nous pouvons prendre pour exemple la ville de Strasbourg qui est la ville où le vélo est le plus répandu en France. Le Val de Loire pourrait alors devenir une place où les mobilités douces sont reines, cela ne dénaturerait pas le paysage et rendrait même certains segments du Val plus attractifs et accessibles.

Pour finir, la marche, qui constitue un moyen de mobilité douce, est également un fort enjeu du Val de Loire. En effet, que ce soit d’un point de vue attractivité ou paysage pur, l’idée de créer de nouveaux sentiers de randonnées autour de la Loire et de nouveaux accès piétons à celle-ci à partir des communes ligériennes est intéressante, notamment afin de les faire profiter aux habitants et visiteurs, et de mettre en valeur le paysage tout en le préservant car éviter une trop forte pollution le préserve nécessairement.

Photo du pont Wilson fermé aux voitures, Tours, photo Adèle Pajon

L’idée de cette sous proposition est d’intégrer l’enjeu climatique dans toutes les orientations du plan de gestion en prévoyant des aménagements, de nouveaux équipements, systèmes et politiques paysagères encourageant la lutte contre ce phénomène. Il faut encourager la prise de dispositions de plus en plus en faveur de la lutte contre le changement climatique dans les documents d’urbanismes tels que les PLU/PLUi. Mais aussi la prise d’arrêtés favorisant les modes de vie adaptés aux changements climatiques comme la Ville de Tours qui a fermé le pont Wilson aux voitures.

➜ Communes, préfets de région et préfets coordinateurs de bassin.

Bibliographie

  1. DREAL Centre Val-de-Loire : http://www.centre-val-de-loire.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=sommaire
  2. Plan Loire Grandeur Nature – Préserver les zones humides : https://www.plan-loire.fr/home/milieux-aquatiques/preserver-les-zones-humides.html
  3. France Relance – Les Chambres d’agriculture accompagnent le Plan de Relance :https://chambres-agriculture.fr/agriculteur-et-politiques/plan-de-relance/
  4. Plan de gestion de la Mission Val de Loire : https://www.valdeloire.org/Gerer/Gestion/Plan-de-gestion-des-orientations-communes-pour-agir
  5. Article “Solution pour le climat : la ville-éponge” : https://www.eib.org/fr/essays/urban-climate-adaptation#
  6. Parc naturel régional Anjou Touraine – La Loire et ses affluents : https://www.parc-loire-anjou-touraine.fr/le-territoire/paysages/la-loire-et-ses-affluents