Comment le risque inondation est-il maîtrisé par les politiques publiques en France ?

L’inondation est une submersion temporaire, par l’eau, de terres qui ne sont pas submergées en temps normal, quelle qu’en soit l’origine.C’est un phénomène naturel susceptible de provoquer des pertes de vie humaine, le déplacement de populations, d’avoir un impact sur la santé humaine, les biens et les réseaux. Elle peut également nuire à l’environnement et compromettre le développement économique. Les inondations représentent la moitié des catastrophes naturelles en raison de leur fréquence (1).

Quelles sont les causes d’une inondation ?

Certaines inondations peuvent être liées à des phénomènes récurrents qui ont lieu chaque année, d’autres à des circonstances météorologiques particulières, comme des orages violents. Elles peuvent aussi être dues à l’effet simultané de plusieurs phénomènes.

Pour autant, certains facteurs peuvent aggraver ce risque : c’est le cas de l’activité humaine. C’est pour cette raison qu’en zone inondable, le développement économique est maîtrisé, puisqu’il constitue l’un des principaux facteurs aggravants. Les aménagements (activités, voiries, remembrement agricole, déforestation…) modifient également  les conditions d’écoulement (imperméabilisation et ruissellement), tout en diminuant les champs d’expansion des crues. Sur les cours d’eau, les aménagements (ponts, enrochements) et le défaut d’entretien de la part des riverains, peuvent amplifier ce risque.Enfin, l’occupation des zones inondables par des bâtiments et matériaux sensibles à l’eau peut aussi générer, en cas de crue, un transport et un dépôt de produits indésirables, susceptibles de former des barrages voire des pollutions accidentelles. Leur rupture peut engendrer une inondation brutale des zones situées en aval.

Frise chronologique

Depuis 1980, de nombreuses lois se sont succédées afin de renforcer la politique de prévention du risque inondation sur le territoire national. En général, l’apparition de nouvelles lois est corrélée à des événements majeurs survenus auparavant. Pour autant, ce n’est pas nécessairement l’événement qui explique toujours la loi.

Evolution de la politique de prévention du risque inondation depuis 1980

Schéma d’acteurs

La gestion des risques majeurs, et donc du risque inondation, est partagée entre une multitude d’acteurs: l’Etat, les collectivités locales, et des acteurs institutionnels. Ils peuvent s’appuyer sur les compétences d’un réseau d’experts. Les compétences et les responsabilités de chacun d’entre eux sont différentes : la complémentarité est primordiale pour répondre à l’ensemble des thématiques de la gestion des risques. Les compétences peuvent être de plusieurs types : réglementaires, techniques ou financières (2)(3)(4)(5).
En 2014, la loi de Modernisation de l’action publique territoriale et à l’affirmation des métropoles (loi MAPTAM) attribue la compétence exclusive et obligatoire de la Gestion des Milieux Aquatiques et de Prévention des Inondations aux communes. En attribuant cette compétence GEMAPI aux communes, l’Etat souhaite clarifier la responsabilité des différents acteurs dans la prévention du risque inondation. Pour autant, l’Etat conserve cependant son rôle de pilotage, de direction, de cette politique de prévention (6).

Les acteurs de la prévention du risque inondation

Quels sont les impacts d’une inondation ?

Les inondations provoquent de lourds impacts non seulement sur les activités humaines, mais aussi sur le milieu lui-même et sa biodiversité.  

Les crues font pleinement partie de la physiologie d’une rivière, mais les inondations qu’elles induisent ne sont pas sans conséquence pour le milieu. Effectivement, une érosion des berges et du fond peut avoir lieu sous l’influence du courant. On observe alors une modification de la morphologie du milieu. 

La biodiversité peut elle aussi subir des modifications à cause d’une inondation : une partie de la faune aquatique et terrestre peut être emportée par les eaux, la végétation peut être arrachée. 

L’impact majeur des inondations est associé à la pollution de l’eau qu’elles produisent. Puisque les eaux peuvent monter dans les zones industrielles, habitées, et agricoles, elles peuvent provoquer de nombreuses contaminations, en répandant différents produits dans les eaux. Ces dernières sont donc susceptibles de détruire la faune et la flore présentent, mais elle met aussi en danger la sécurité des personnes, en particulier si des substances dangereuses sont déplacées par les eaux puis mises en contact avec des populations. D’une manière générale, une mauvaise qualité de l’eau pourra impacter l’ensemble des usages qui en sont fait (7).

Enfin, les inondations n’épargnent pas les civils, qui peuvent ne pas avoir le temps d’évacuer les zones inondables. Tous les biens peuvent également subir des dégâts à cause du courant: voitures, bâtiments, infrastructures de transport, ponts etc. L’Etat a donc mis en place une politique de prévention du risque inondation, afin de prévenir l’ensemble de ces impacts. Elle s’illustre à travers plusieurs outils.

Quels outils pour prévenir les inondations ?

Elle s’articule autour de plusieurs outils : 

  • Les plans de prévention du risque d’inondation (PPRI) : l’Etat fixe des contraintes en matière d’urbanisme en zone inondable. 
  • Les programmes d’actions de prévention des inondations (PAPI) : ils sont réalisés par les collectivités territoriales pour définir et financer les mesures appropriées pour réduire la vulnérabilité du territoire, et protéger les populations 

Le dispositif d’Organisation de la réponse de la sécurité civile (ORSEC) : c’est un plan d’urgence porté par l’Etat et les collectivités, qui concerne cette fois-çi la gestion d’une crise, lorsqu’elle n’a pas pu être évitée.

Conclusion

La prévention du risque inondation implique de multiples acteurs et expose des intérêts parfois contradictoires (développement économique immédiat, protection à long terme des populations). On retrouve deux approches de la prévention du risque inondation en France :  l’une institutionnelle est menée par les services de l’État, l’autre locale est prise en charge par les collectivités territoriales (8). Le risque inondation est vu par l’État comme un risque majeur, en le définissant comme un type de risque valable pour tous les territoires. Pourtant, il s’agit d’un risque qui s’inscrit dans un territoire donné : la gestion locale du risque inondation est alors pris en charge par les collectivités. Les deux approches n’impliquent pas les mêmes critères de rationalisation et de connaissance en matière de risque. On pourrait se demander si la place prépondérante accordée à l’approche institutionnelle menée par les services de l’État est suffisamment coordonnée avec les connaissances locales du risque. 

Depuis le début des années 2000, cette politique s’est développée grâce à l’évolution des connaissances scientifiques des risques, mais aussi des prévisions météorologiques et hydrographiques. 

La gestion du risque inondation, historiquement centrée sur l’utilisation de digues ou de barrages, semble dorénavant s’orienter sur une gestion plus complète. La Stratégie nationale de gestion du risque inondation (SNGRI en 2014) s’articule maintenant autour de 4 axes : 

  • développer les connaissances pour mieux comprendre les risques
  • consolider la gouvernance des risques de catastrophes
  • renforcer la résilience des territoires
  • se préparer à la gestion de crise

La France possède donc une politique de prévention et de gestion du risque inondation très structurée, qui insiste davantage sur la prévention. En menant un politique adaptée en matière d’urbanisme (PPR), l’Etat souhaite limiter l’exposition au risque d’inondation. Elle complète son champ d’actions par plusieurs mesures ayant pour objectif de réduire la vulnérabilité des territoires, de développer la culture du risque au sein de la population (PAPI). Ainsi, l’Etat semble mener une politique bien structurée, aussi bien sur sa définition que sur la mise en œuvre de sa politique de prévention.


Bibliographie

  1. Gouvernement de l’Etat français. Prévention du risque inondation [Internet]. inconnue. Disponible sur: https://www.gouvernement.fr/risques/inondation 

  2.  Rigaud C. Les services de l’Etat dans la prévention du risque inondation [Internet]. hauts-de-france.developpement-durable.gouv.fr. 2018 [cité 14 oct 2020]. Disponible sur: https://www.hauts-de-france.developpement-durable.gouv.fr/?Les-services-de-l-Etat 

  3. Rigaud C. Les experts de la prévention du risque inondation [Internet]. 2018 [cité 12 oct 2020]. Disponible sur: https://www.hauts-de-france.developpement-durable.gouv.fr/?Un-reseau-d-expert-est-egalement-mobilisable-par 

  4. Rigaud C. Les collectivités locales de la prévention du risque inondation [Internet]. hauts-de-france.developpement-durable.gouv.fr. 2018 [cité 11 oct 2020]. Disponible sur: https://www.hauts-de-france.developpement-durable.gouv.fr/?Les-collectivites-locales 

  5.  Rigaud C. Les acteurs institutionnels de la prévention du risque inondation [Internet]. hauts-de-france.developpement-durable.gouv.fr. 2018 [cité 13 oct 2020]. Disponible sur: https://www.hauts-de-france.developpement-durable.gouv.fr/?Les-acteurs-institutionnels

  6.  Mortureux M. La gestion du risque inondation par l’État. févr 2017; Disponible sur: https://www.cairn.info/revue-responsabilite-et-environnement-2017-2-page-74.htm

  7.  EauFrance. Les impacts des inondations et des submersions marines [Internet]. eaufrance.fr. 2019 [cité 20 nov 2020]. Disponible sur: https://www.eaufrance.fr/les-impacts-des-inondations-et-des-submersions-marines

  8. Tricot A. La prévention des risques d’inondation en France : entre approche normative de l’Etat et expériences locales des cours d’eau [Internet]. 2008. Disponible sur: http://www.vrm.ca/wp-content/uploads/EUE2_Tricot.pdf

Références connexes